mardi 16 août 2011

Euthanasie : un témoignage

Aujourd’hui, nous parlons de ce médecin que d’aucuns décrivent comme un héros et d’autres un criminel parce qu’il a mis fin à la vie de patients.

À ce stade de l’enquête, nous ne savons pas si les patients en question étaient consentants ou pas, aussi, je me garderais bien d’émettre un jugement dans un sens ou un autre.

Je vais plutôt vous raconter cette histoire personnelle que j’ai connu dans le pays où je vis, la Belgique, pays où l’euthanasie active est permise depuis quelques années, bientôt dix.

Ici, vous avez un lien qui vous explique les dispositions légales qui régissent cette disposition.

Tout ça, c’est du papier, des écrits…

Ma belle-mère était gravement malade. Cancer des intestins en phase terminale. Douleurs rebelles aux drogues, elle ne pouvait plus rien avaler depuis longtemps et mourait de sensation de faim, bien qu’elle fût sous perfusion.

Elle avait pris ses dispositions légales pour l’euthanasie. Le jour et l’heure avait été fixés, cela devait se dérouler à l’hôpital où elle était rentrée depuis quelques semaines pour ne plus jamais en sortir. Nous sommes venus ce jour-là pour notre dernière visite, son fils mon époux, sa fille et son gendre, et moi-même.

Les infirmières, les médecins… tout cela s’est passé dans les larmes, bien sûr.

Alors que j’avais toujours été pour l’euthanasie AVANT DE CONNAÎTRE, j’ai changé d’avis ce jour-là. Oh, bien sûr ça soulageait ses souffrances à elle, mais c’est une épreuve terrible pour la famille. J’ai bien mis trois mois à lui en vouloir d’être partie ainsi, six mois à le regretter. Puis, le temps passant, j’ai reconnu que c’était mieux pour elle. Mais je n’ai plus pu depuis avoir un avis tranché sur l’euthanasie, ni dans un sens, ni dans l’autre.

Elle était une catholique fervente et nul doute qu’elle n’aurait pas eu ce projet si les douleurs avaient été supportables. Je crois que la grande question réside en fait dans la solution de rendre la fin de vie supportable ou pas. Certains d’entre nous ont vécu des drames terribles, qui les ont fait tellement souffrir psychologiquement, et/ou sentimentalement et/ou physiquement qu’ils ont déjà été tentés d’en finir, qu’ils ont même essayé. Et puis le temps passe, et parfois l’on sort de l’ornière et on se dit que si on était mort on ne connaîtrait pas notre bonheur actuel, et qu’on aurait fait du mal pour rien à ceux qui nous aiment.

Car la mort, voyez-vous, est irrémédiable, et si l’on doit tous mourir un jour, à partir du moment où l’on est conçu, quand ce n’est pas l’heure, ce n’est pas l’heure. Je comprends que des douleurs insupportables, morales et/ou physiques nous fassent l’avancer. Quand l’issue fatale est de toute façon à très brève échéance, on n’ampute pas grand-chose ; mais l’euthanasie active peut être pour d’autres cas, comme dans la loi belge où le seul fait d’être atteint d’une maladie incurable, sans même être mortelle, est suffisant. Sachons bien ce que l’on fait avant de légiférer.

Oui, sachons bien ce que l’on fait. Car, voyez-vous, en Belgique, les factures d’hôpitaux sont très détaillées. Chaque acte y est consigné. Cela devrait se faire aussi en France, cette proposition revient régulièrement sur le tapis. Alors, le jour où vous aurez assisté, dans les deux sens du terme,  à la mort de votre parent, de votre conjoint, de votre enfant, et que, quelques mois plus tard, vous recevez la facture détaillée de l’hôpital :

-      Honoraires de l’infirmière X de telle heure à telle heure : tant
-      Honoraires de l’infirmière Y de telle heure à telle heure : tant
-      Honoraires du médecin X de telle heure à telle heure : tant
-      Honoraire du médecin Y de telle heure à telle heure : tant
-      Bassines : tant
-      Alèses : tant
-      4 seringues : tant
-      4 aiguilles : tant
-      Penthotal : tant
-      Etc.

Même pas un « kit euthanasie » comme chez le véto. Non, tout est détaillé.

Oui, quelques mois plus tard, quand justement vous commenciez à respirer à nouveau sans être pris chaque minute dans le carcan de ce fardeau d’avoir assisté et été complice de la mort de votre être cher, là c’est à cette période-là que vous recevez cette putain de facture détaillée qui est comme une immense gifle dans votre gueule. Et que vous replongez encore dans cette culpabilité avec laquelle vous serez somme toute obligé de vivre tout le long de votre restant de vie.









Aucun commentaire: